De sa création en 1983 jusqu’en 2002, le réseau BANK OF AFRICA a connu un développement régulier : une implantation progressive dans 7 pays ; des activités désormais élargies au-delà des banques commerciales ; une puissance accrue illustrant ces développements. En recherche d’expansion tous azimuts, le Groupe va alors saisir une occasion exceptionnelle : celle d’une première présence en Afrique anglophone.
C’est au Kenya que se situe cette opportunité. La Banque Indosuez, en cours de fusion avec le Crédit Agricole, y possède depuis longtemps une filiale, issue de ses antécédents coloniaux. Installée à Nairobi et Mombasa-, la banque est petite mais elle est bien gérée par une équipe de qualité : elle compte de très grandes entreprises clientes à l’international, possède une bonne réputation et son portefeuille de crédits est sain.
Le pari est très risqué : le secteur bancaire kenyan est un des plus performants et compétitifs -près de 45 banques – d’Afrique, et le Groupe BOA est absent de la zone. Mais la tentation est trop belle : les discussions s’engagent donc en 2002 avec Indosuez et dureront deux longues années. Cette aventure passionnante laissera plusieurs souvenirs inoubliables.
Pour les négociations, il faut d’abord faire admettre BOA comme interlocuteur acceptable, ce qui est assez vite obtenu grâce à un réseau désormais consistant, une bonne image et un actionnariat original. Les débats sur le prix de la transaction sont plus délicats : Indosuez met haut les « enchères ». Les négociations, menées dans le plus grand secret à Paris et Nairobi, sont difficiles, parfois au bord de la rupture. Il faut toute l’expérience des négociateurs et avocats représentant BOA pour trouver les arguments pour les diminutions de prix demandées. Toutefois, Indosuez, avant tout sensible à l’honorabilité du repreneur et aux engagements qu’il prendra, apprécie les méthodes et les objectifs de ce candidat, et un accord est finalement trouvé.
Dans l’intervalle, BOA a dû trouver un montage juridique original pour répondre aux exigences de la Banque Centrale du Kenya (BCK) pour l’actionnariat des banques commerciales. Grâce à la participation, aux côtés des holdings de tête du Groupe, des BANK OF AFRICA du Bénin, de Côte d’Ivoire et de Madagascar, le dossier d’agrément progresse. La confiance entre la holding et ses filiales, grâce à la transparence des décisions prises et l’adhésion de tous aux programmes de développement, permet encore une fois de réussir ce nouveau projet. L’arrivée ultérieure du FMO et du Fonds d’Investissement Aureos consolideront ce « tour de table » initial.
Les derniers travaux préparatoires, menés enfin à découvert, permettent de rencontrer les équipes en place. Il faut les convaincre de la qualité du projet. Celui-ci va bouleverser les habitudes antérieures – avec une banque surtout tournée à l’avenir vers les entreprises kenyanes, l’innovation dans les produits et la création de nouvelles agences – et inclura de fortes prévisions de croissance. Il offre en échange à chacun le maintien au sein de la nouvelle entité et de réelles possibilités d’évolution à l’avenir. La franchise du discours et les bons échos émis par le Groupe parviennent à l’emporter sur le handicap de son origine francophone, et l’engagement sans réserve de tous est rapidement obtenu. Après une dernière péripétie juridique rencontrée pour l’adoption de notre nom, la BANK OF AFRICA-KENYA est agréée le 30 juin 2004.
L’entrée au Kenya est une immense satisfaction pour la BOA. Les 35 millions d’habitants que compte déjà le pays et sa puissante économie, fleuron de l’Afrique de l’Est, ouvrent des perspectives inespérées. Mais le plaisir de ce succès s’accompagne sans délai de la conscience des défis à relever. Il faudra notamment réussir dans l’urgence deux lourds chantiers pour éclaircir l’horizon. Le premier est interne : le Groupe doit à la fois construire à Nairobi une organisation fidèle à sa philosophie mais adaptée aux méthodes de travail et aux approches commerciales pertinentes au Kenya, maîtriser le nouveau contexte réglementaire, conserver toute la clientèle antérieure, obtenir l’adhésion des équipes locales aux objectifs de développement et de diversification, et assurer une bonne intégration de la nouvelle filiale au sein du réseau BOA. La mobilisation de tous -salariés comme Administrateurs- permet de progresser sur ces objectifs, mais l’avancée est lente. Les aménagements du management introduits en 2008 et le soutien massif des actionnaires -avec un capital déjà quintuplé en 2010-accélèreront l’adaptation et donneront à la banque une autre dimension. Le second est externe. Pendant que l’entité prend peu à peu sa place sur le marché kenyan, le Groupe parvient à s’implanter dans les deux pays voisins : l’Ouganda en 2006, la Tanzanie en 2007. La présence de la BOA dans les trois pays de l’East African Community (EAC) change la donne et apporte à BOA-KENYA un souffle nouveau.
Appuyée sur cette base renforcée, la banque va pouvoir consolider peu à peu son rang parmi ses consoeurs locales et devenir le « hub » de BOA dans l’AEC. Grâce à l’expérience et l’efficacité de ses équipes et à l’appui du Groupe, elle est présente aussi bien dans le financement des entreprises et des ménages que sur les marchés financiers nationaux, et son public s’élargit. Certes, les variations du Shilling Kenyan ne permettent pas toujours aux actionnaires étrangers de récolter le fruit de la croissance et des résultats dégagés. Mais toutes les parties prenantes sont confiantes : l’implantation au Kenya, qui fête ce 30 juin son vingtième anniversaire, a été un acte de foi sur l’avenir du continent, l’essor prévisible des échanges entre grandes régions de celui-ci et la construction de groupes bancaires régionaux interconnectés.
Vingt ans plus tard, ces espoirs sont plus que jamais vivaces et il n’est nul doute que la BOA-KENYA y apportera avec assurance et succès sa contribution.
Joyeux anniversaire.
Pau Derreumaux
Article publié le 24/06/2024